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13 Reasons Why saison 2: comment la série est devenue la meilleure des réponses au « slut shaming »

13 Reasons Why saison 2 comment la série est devenue la meilleure des réponses au slut -shaming grande

Aussi adulée que décriée, la série 13 Reasons Why aborde des tabous comme le slut-shaming à travers le personnage d’Hannah Baker !

Nul sérivore n’est censé ignorer le retentissant effet de la série 13 Reasons Why. La première saison, lâchée en 2017 sur Netflix, avait déjà fait couler beaucoup d’encre. Et pour cause : en relatant le harcèlement (scolaire, mais pas que) subi par la lycéenne Hannah Baker qui la poussera au suicide. La fiction a abordé frontalement nombre des pires tabous de la société. Pêle-mêle, la drogue, l’alcoolisme juvénile ou encore l’automutilation.

Mais aussi des notions encore peu (re)connues en France comme le slut shaming. Soit, dans un langage peu digne de Baudelaire, la « stigmatisation des salopes ». Un concept qui sert d’ailleurs de fil d’Arianne de la saison 2. Elle est disponible depuis le 18 mai 2018 sur la plateforme de SVoD. MCE vous explique pourquoi plus en détails – et préfère vous prévenir que le reste de l’article comportera quelques spoilers sur le teen drama !

Le slut shaming, késako ?

Avant toute chose, sans doute faudrait-il rappeler ce qu’est le slut shaming, tout du moins dans les grandes lignes. La pratique consister à juger, mépriser, rabaisser voire même culpabiliser une femme en remettant en cause ses mœurs, présumées… hors-normes. Aussi, on clouera au pilori toutes celles « trop pudibondes », mais aussi au « trop » grand nombre de conquêtes, aux vêtements « trop » courts ou aux attitudes « trop » provocantes. Bref, une accumulation de « trop » qui ne passe pas pour une représentante de la gent féminine.

Un schéma médiéval et misogyne, dites-vous ? Ce dernier est pourtant bien plus répandu qu’on ne le croit et Hannah Baker en fait très largement les frais tout au long de la série. Dès le coup d’envoi, on lui prétend une promiscuité sexuelle née d’une partie de jambes en l’air dans un espace public – une rumeur et rien d’autre, lancée par Justin en mal de popularité. Un peu plus tard, on lui prête une relation saphique avec une camarade de classe, elle aussi tout aussi chiquée. Même si le calvaire atteint son acmé dans la seconde salve d’épisodes.

Décrédibiliser la victime

Pour mémoire, ceux-ci se concentrent sur le procès qui opposent les parents d’Hannah contre le lycée Liberty. À la justice de déterminer quelle fut la part de responsabilité de l’établissement quant au suicide de la jeune fille. Tour à tour, les avocats appellent à la barre ses anciens camarades de classe, bien connus des spectateurs puisque tous ou presque liés aux fameuses treize cassettes.

C’est là que ça se gâte : plusieurs personnages de sexe masculin, pour se départir de certaines accusations et pas des moindres (on parle ici de viol), misent tout sur le slut shaming pour mieux décrédibiliser feue Hannah, afin de prouver qu’elle, disons le clairement, méritait ses souffrances. Que ce soit Marcus, qui s’est montré particulièrement entreprenant (#euphémisme) lors d’un date scruté à la loupe par ses « amis », ou Bryce, qui a tout bonnement abusé de la lycéenne dans son jacuzzi, tous adoptent la même stratégie. Scander comme un métronome « Si Hannah a vécu cela, c’est qu’elle l’a mérité. Elle en avait envie ».

13 Reasons Why embrasse l’ère #MeToo

Aussi, on pourrait penser que la série loupe largement le coche #MeToo et encourage un comportement des plus toxiques (euphémisme bis). Il n’en est pourtant rien : que ce soit à travers l’histoire funeste d’Hannah, ou celle de Jessica, autre victime des sévices de Bryce, les showrunners 13 Reasons Why de s’efforcent de défendre les droits des femmes et de démonter une flopée de diktats avec des protagonistes plus nuancés.

Car ici, les filles ne sont pas montrées que comme vierges ou putains, faiblesse de la saison 1 de 13 Reasons Why. En effet, Hannah y apparaissait blanche et innocente, nous conduisant de facto, charitables spectateurs que nous sommes, à l’apprécier. Dans cette nouvelle mouture, on sait que la jeune fille avait ses envies, ses lubies, ses désirs. Parce qu’elle aimait séduire et être séduite, aimer et être aimée ou encore faire l’amour (nous y reviendrons plus bas)… tout cela ne fait, en aucun cas, d’elle une salope. Juste une adolescente épanouie en phase avec sa sexualité.

13 Reasons Why saison 2: comment la série est devenue la meilleure des réponses au « slut shaming »

Mais là où cette saison 2 tape le plus fort, c’est en s’attaquant à quelques clichés testostéronés à la dent dure. Zack, Marcus, Justin… tous ont une pression sociale sur les épaules, où l’on espère qu’ils soient les fiers acteurs d’une « virilité abusive » pour citer l’ami Eddy de Pretto. Si certains personnages arrivent à envoyer paître ces attentes pesantes, d’autres, à l’inverse, en restent victimes, mettant en évidence des contre-exemples à ne pas suivre.

Au fond, et contre toute-attente, c’est peut-être bien Justin le repenti qui résume le mieux notre propos. Dans l’épisode 6 de la saison 2, Zack avoue avoir entretenu une relation secrète avec Hannah –et donc couché avec elle plus d’une fois. Des révélations que Clay, fou amoureux de la défunte, peine à digérer, la jugeant dès lors comme une fille facile. Ce à quoi, Justin lui répond « Tu sais avec combien de filles j’ai couché ? Un paquet. Ce qui fait de moi un tombeur. Hannah a couché avec un mec. Elle flash sur un autre, moi. Puis un embrasse un troisième, toi. Rien d’anormal pas vrai ? Mais d’un coup, ça ferait d’elle une pute ? ». Juste assez pour clouer le bec de Clay et des haters partageant le même vieux schéma de pensée, par la même occasion.

Mélissa Chevreuil

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