Culture
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Vin’s sur le chemin de la sagesse avec « Sophia » ! [INTERVIEW]

Vin's gagne en expérience et le prouve avec "Sophia" ! [INTERVIEW]

Le 24 mai, Vin's dévoilera son tout premier album intitulé "Sophia". A cette occasion, le rappeur retrace sa carrière et présente cet opus !

Demain, le rappeur originaire du Sud de la France lâchera donc la bête « Sophia ». Un premier album qui n’a rien d’un coup d’essai pour Vin’s ! Issu de la scène rap indé, le bonhomme a déjà fait ses armes au Waza Crew. Depuis 2014, il avance en solo et dévoile la mixtape « Freeson » (2014) suivi par l’EP « 23H59 » (2018). Aujourd’hui, c’est bien déterminé à marquer son temps que Vin’s revient avec « Sophia ». Il nous dit tout.

Une plume acérée

Quand on t’écoute, on sent que tu es sensible aux mots. D’où te vient ce goût pour l’écriture ?

Vin’s : Je pense que ça vient de mon père. C’est un amoureux des mots, c’est quelqu’un qui parle bien, il a cet art oratoire. Il aime ça et je pense qu’il m’a transmis ça naturellement. Jusqu’à mes 10 ans, je n’étais pas intéressé par l’écriture. J’associais ça aux cours de français et ça me faisait ch*er. C’est le rap qui m’a donner le goût le l’écriture. J’ai compris qu’on pouvait utiliser l’écriture pour autre chose que « le scolaire ». Depuis, j’ai cet amour pour les mots.

Dans tes textes, tu aimes dépeindre la société de manière satirique, à coup de métaphores tristement vraies. Est-ce que tu te retrouves dans le genre du rap conscient ?

Je n’aime pas ce terme parce qu’il est devenu péjoratif. Ce qui me gêne, c’est tout ce qu’on a mis derrière et je ne suis pas d’accord avec ça. Par contre, je fais du rap « conscient » dans le sens où je ne dis pas n’importe quoi. Plus que du rap conscient, je dirais plus que je fais du rap qui essaye de toucher, qui essaye de faire ressentir des choses.

On pourrait même dire que ton rap est assez « philosophique ». D’ailleurs, tu as appelé ton album « Sophia ». C’est pour cette raison ?

C’est lié. Je cherchais un terme qui pouvait synthétiser le processus que je relate dans cet album : le fait de découvrir la vie. On rentre tous dans une forme d’illusion et, à un moment de notre vie, on est face à une désillusion. Ça ne se passe pas toujours comme on l’avait prévu. Toutes ces choses nous permettent de finir par accepter les choses pour ce qu’elles sont. Souffrance ou joie, on prend tout le package et on se dit : « Ok, tout ça, je l’accepte ». Le but c’était donc de relater ça. Je voulais un mot qui soit l’aboutissement de ce processus. « Sophia » c’est la sagesse acquise avec l’expérience. Et je trouvais ça noble de personnifier mon album par un prénom féminin.

Tu as teasé ton album avec des indices postés sur Youtube, sous forme de freestyles. C’est une volonté de faire réfléchir tes auditeurs sur tes textes ?

Exactement. C’est une volonté de les habituer à réfléchir sur ce que je peux faire, à ce dire que rien n’est là au hasard. On est dans le souci du détail, donc on veut habituer les gens à lire entre les lignes.

Le rap, une évidence

Dans le rap, tu as tout d’un bon élève, pourtant, enfant, tu détestais l’école.

Vin’s : Ce n’est pas que je détestais l’école, c’est l’école qui ne me correspondait pas. Je suis toujours persuadé que l’école ne correspond pas à tout le monde. Le système éducatif mis en place au sein de l’Éducation National n’est pas positif et n’est pas sain pour l’esprit de quelqu’un. Il y a des gens qui arrivent à rester lucide et à aller loin dans les études sans se faire trop formater. Il y a des gens qui vont être complètement formatés. Et il y a des gens, comme moi, qui ne vont tout simplement pas rentrer dans le moule.

Je n’étais pas spécialement bête, mais l’école me la fait croire pendant 16 ans. J’ai donc cru que j’étais un cancre. Il n’y a aucune remise en question du côté de l’équipe pédagogique. Quand un élève n’y arrive pas, c’est le prof qu’il faut remettre en question, pas l’élève. J’ai compris ça plus tard, mais à l’école j’étais dans un système qui était en train de me broyer. Donc c’est pour ça que j’ai un peu de rancune envers l’école. Moi j’ai eu de la chance, mais il y en a plein que ça a détruit.

Le rap a été une bouée de sauvetage pour l’adolescent que tu étais ?

Complètement ! Ça n’aurait pas été le rap, ça aurait été autre chose, j’en suis persuadé. L’énergie, l’envie et la passion que j’ai, j’aurais pu la mettre dans n’importe quoi et ça, j’en suis persuadé. Ça a été le rap et ça m’a permis de m’accrocher à quelque chose, de me détacher de l’école et de me dire que ça ira parce que j’ai ça.

Il y a quelque chose de sombre dans tes morceaux. Tu abordes des thématiques noires : la rupture, la dépression, la mort… La musique est une forme d’exutoire pour toi ?

Totalement. Je vais même aller plus loin : la musique me permet de mettre en avant des choses qui me font peur ou des failles que je peux avoir. Le fait de les mettre en valeur, c’est une façon de les accepter. De dire que j’ai pas confiance en moi dans un morceau, est-ce que ce n’est pas la plus belle façon d’avoir confiance en soit ?

Des projets riches et percutants

Le 5 décembre 2017, tu sors « #MeToo » et c’est le buzz ! Le morceau fait alors rapidement le tour du net. Quelle répercussion ce titre a eu sur ta carrière ?

Vin’s : Les gens me connaissent davantage. Ça m’a permis aussi de toucher des médias que je n’aurais peut-être pas touché avec un rap plus « classique ». Ça a donc ouvert des portes. Au-delà de ce que ça a changé dans ma carrière, c’est l’impact auprès des gens qui m’a aussi énormément touché. J’ai eu beaucoup de retours de femmes sur ce morceau. Ça a été le meilleur retour que je puisse avoir sur ce son.

Ensuite, vient l’EP « 23H59 », dévoilé le 19 janvier 2018. Un succès également, porté par des morceaux forts comme « Peur » ou « Marianne », sur la montée sur Front National et l’importance d’aller voter. Les Européennes ce dimanche, c’est important pour toi ?

J’ai un peu de mal avec la politique. Pour moi, c’est un écran de fumée qui ne sert à rien. Doit-on voter blanc pour montrer notre opposition ? Dans tous les cas, on se fait b*iser… Il y a un mentaliste qui s’appelle Fabien Olicard qui a fait une vidéo sur Youtube qui démontre mathématiquement pourquoi le système de vote français est biaisé. Il explique pourquoi c’est de la triche et pourquoi, de toutes façons, voter ça ne sert à rien parce qu’ils ont calculé leur truc pour faire passer qui ils veulent. Donc à partir de là, je trouve que la politique c’est falch.

« Sophia », un premier album prometteur

Aujourd’hui, tu reviens donc avec « Sophia ». Ça fait quoi de sortir son premier album ?

Vin’s : C’est un grand sentiment d’accomplissement. Beaucoup de fierté. Ça a été long et pas toujours facile, j’ai appris énormément de choses et le fait d’arriver à la fin, c’est vraiment une fierté. Une fierté collective que je ressens avec les gens de mon équipe parce qu’on y est arrivé, quoi ! C’est vraiment très satisfaisant. Un petit peu de peur aussi parce que les gens vont le découvrir et j’ai pris des risques sur ce projet. Je me suis mis à nu, j’ai fait évoluer ma musique, je suis sorti de ma zone de confort. Mais je suis très très fier de mon projet, j’en suis content !

Sur cet album, on t’entend plus chanter qu’auparavant. Ça traduit une forme d’apaisement chez toi ? Ou juste une volonté de te diversifier ?

C’est surtout une volonté de me diversifier et une volonté de chanter. Ça fait longtemps que j’en avais envie. Je travaille beaucoup avec Sylver qui a fait « Peur » avec moi et qui a fait le morceau « Sophia ». C’est un vrai ami, voire quelqu’un de ma famille, qui chante bien, qui chante beaucoup et qui m’a beaucoup apporté en terme de mélodie. Chanter pour moi c’est une envie qui s’est enfin concrétisée.

Sur « Abîmé », tu poses avec El’ka, issu du Waza Crew, comme toi. Sans surprise, la collaboration fonctionne. Mais, à l’avenir, avec qui tu aimerais collaborer ?

Alors, il y a plein d’artistes avec qui j’aimais collaborer ! Némir par exemple. Chilla aussi. Je pense qu’il peut y avoir un contre-pied intéressant sur un morceau qu’on pourrait faire tous les deux. J’aimerais également travailler avec l’équipe du Sommet, le Motif et Junior à la Prod, qui sont des gars que je suis et que je trouve vraiment fort. J’aime beaucoup leur travail, leur énergie, donc j’aimerais beaucoup bosser avec eux.

Un mot en conclusion ?

Il faut aller acheter « Sophia », il faut le streamer… Ce que vous voulez ! Mais il faut surtout aller l’écouter. J’espère que ça va toucher les gens, parce que c’est ça le but de ma musique, donc j’espère que ma mission soit réussie !

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