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Turquie : un prof écope de 15 mois ferme pour des tweets hostiles à l’Islam

Turquie un prof écope de 15 mois ferme pour des tweets hostiles à l'Islam

La peine est tombée hier même : un tribunal turc a décidé de condamner un enseignant à 15 mois de prison pour avoir blasphémé sur le réseau social Twitter

La limite entre le respect de la liberté d’expression et la censure est bien ténue. Adoptant le pseudonyme (certes pas forcément des plus subtils) @allah, un jeune prof turc s’est attiré les foudres des autorités du pays en diffusant des messages ironiques, critiquant l’actuel gouvernement tenu d’une main de fer par Recep Tayyip Erdogan.

Résultat : 15 mois de prison ont été retenus pour l’accusé par un tribunal de Mus, une ville située dans l’est turc. Les magistrats se sont fondés sur l’article 216 du code pénal qui réprime tout dénigrement des valeurs religieuses en considérant que le blasphème manifeste était ici aggravé par l’usurpation du nom de dieu.

Un média social ponctuellement muselé

Si des réseaux sociaux sont devenus aussi incontournables que Facebook, Google+ ou Ask, c’est qu’ils permettent à tout le monde d’avoir des choses à raconter, à partager. Pourtant, d’une direction nationale du réseau à l’oiseau siffleur à l’autre, les sensibilités des webmasters semblent être à géométrie variable. En effet, après avoir tout simplement fermé l’accès à Twitter puis YouTube sur décision du gouvernement en mars dernier pour raisons politiques, le pouvoir turc a encore frappé en faisant condamner ce professeur parjure. La semaine dernière, c’étaient aux instances dirigeantes de Twitter Pakistan de procéder au blocage de contenus considérés blasphématoires.

Rappelons qu’à l’époque des hashtags #unbonjuif et #unjuifmort apparus sur Twitter France en octobre 2012, ce n’était qu’au terme d’un bras de fer s’étant terminé devant le TGI de Paris que la porte-parole du gouvernement, Najat Vallaud-Belkacem, avait obtenu de Twitter l’obligation de transmettre aux associations plaignantes les informations sur les auteurs des messages. Certains pays musulmans modérés ne s’encombrent pas autant et décident plutôt de couper l’arrivée d’eau ou de punir les internautes quand l’islam est estimé bafoué : soit en demandant au réseau social de coopérer soit parfois sans avoir besoin d’imprimer l’impulsion à ce dernier qui s’exécute tout seul, ce qui paraît encore pire.

Y’a-t-il péril sécuritaire pour cet état dans l’antichambre de l’Europe ?

Cette histoire intervient de longs mois après le début d’une vague de contestation en Turquie qui a connu un temps fort avec l’occupation de la place Taksim, à Istanbul, l’été dernier. Une protestation intergénérationnelle qui trouve son point d’orgue dans la dénonciation de la corruption générale dont se rend coupable la classe politique assujettie à Erdogan occupant actuellement le pouvoir. Dans cette atmosphère tendue, apparemment même l’humour en ligne ne passe pas.

Ertan P. alias @allah ose pourtant, plaisantant de l’état de sa société avec un recul comique : dans mon état d’esprit d’aujourd’hui, je n’aurais pas créé le petit doigt des êtres humains. Il esquisse même une dénonciation supplémentaire de la répression dont les citoyens turcs font l’objet en écrivant c’est très sûr ici, car il n’y a pas de police. Se défendant d’être l’auteur de ces messages, l’homme a fait valoir aux jurés qu’on l’avait hacké pour tenter de minimiser sa peine. En vain. Le quotidien Hürriyet indique toutefois que le prof condamné a déjà fait appel de ce jugement.

Sources : france24 , lexpansion.lexpress , news.fr.msn , news.yahoo

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