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Enseignement supérieur en France : Christian Lerminiaux donne son avis

Christian Lerminiaux donne son avis sur le financement de l’enseignement supérieur en France

Le Président sortant de la CDEFI, Christian Lerminiaux, parle du financement de l’enseignement supérieur

Le Financement de l’enseignement supérieur en France, quelles perspectives, par Christian Lerminiaux Président sortant de la CDEFI

Le financement de l’Enseignement Supérieur en France est aujourd’hui relativement faible si on le compare aux autres pays développés, et ceci a bien été explicité dans le rapport intermédiaire de la Stratégie Nationale de l’Enseignement Supérieur. Toutefois, les dépenses publiques en matière de R&D en France sont à un niveau important. Il apparaît clairement, en regard de la situation des finances publiques, qu’on ne peut s’attendre dans l’avenir à une hausse du financement de l’Etat. Il faut donc que la société française se donne des objectifs à long terme quant au financement de l’enseignement supérieur en pourcentage du PIB. Le niveau de financement de l’enseignement supérieur doit être augmenté de 50 %. Il restera à définir la part que chacun des trois principaux financeurs, à savoir la puissance publique, les ménages et les entreprises, doit y consacrer.

Les ménages contribuent aujourd’hui au financement des établissements d’enseignement supérieur publics à hauteur de 1 à 2 %, essentiellement par les frais de scolarité et de façon plus anecdotique par les donations de personnes privées. Les entreprises y contribuent pour 2 à 10 % par la taxe d’apprentissage, la formation continue, le mécénat et les contrats de recherche. L’Etat et les collectivités financent le solde via des subventions directes ou des appels d’offres d’agences de financement. Il faudrait sans doute ajouter l’Europe, qui contribue cependant essentiellement via des appels d’offres ou des mécanismes de cofinancement de type FEDER, et qui n’intervient à ce jour que pour 1 % à peu près.

Au vu de ces chiffres, il apparaît donc clairement aujourd’hui que les principaux gisements de financement se situent au niveau des ménages ou des entreprises. Mais faire reposer l’ensemble des besoins de financement sur les frais de scolarité n’apparaît pas possible. Il faudrait, si l’on considère les chiffres ci-dessus, envisager une multiplication de leur contribution par un facteur 15 à 50. C’est le cœur de ce message. Il faut donc considérer les autres sources de financement afin de limiter au plus à un facteur 4 cette hausse, qui serait déjà importante, et pour laquelle il faudra envisager des dispositifs d’accompagnement, y compris par un paiement différé, dont le recouvrement pourra reposer sur les entreprises. Les donations des particuliers, en revanche, sont à un niveau particulièrement faible en France.

D’où la proposition de faire prendre conscience à tous les Français, dont les chiffres montrent que leur richesse privée est une des plus fortes au monde, qu’il est plus important pour leur descendance que les moyens dont ils disposent soient davantage consacrés au bien commun (à savoir le financement du développement des universités), une fois le financement des études de leurs enfants assuré, et une fois mis de côté les moyens nécessaires à leur assurer une fin de vie décente, qu’à doter leurs enfants qui ont déjà de confortables situations pour la plupart d’entre eux. C’est en effet leur université de formation qui permet aux français d’acquérir les moyens dont ils disposent. Il s’agit de plusieurs pourcents du budget des établissements; mais cela demande un grand changement d’état d’esprit. La richesse moyenne des français est de l’ordre de 250 000 €, et le montant moyen des héritages de 180 000 € en 2006, pour un montant global de 60 Md€. Si 10 % de cette somme était consacrée à l’enseignement supérieur, cela représenterait 6 Md€, c’est-à-dire plus de 20 % du budget du MENESR. L’objectif que chaque français, à son décès, donne quelques pourcents de son héritage à l’établissement qui lui a permis son parcours professionnel ne semble donc pas hors de propos.

Un dialogue plus fort entre l’enseignement supérieur et les entreprises ?

Enfin les entreprises sont tout à fait prêtes à augmenter leur contribution, mais cela nécessitera un dialogue plus fort entre elles et les universités. Les chiffres de l’OCDE, en ce qui concerne notamment la recherche, montrent bien qu’un facteur 3 à 6 peut être envisageable dès lors que cette condition sera remplie. Le développement de la formation continue est aussi une source de financement importante à développer. Le mécénat, enfin, pourra aussi jouer un rôle et qui dit mécénat, dit volonté d’accompagner un établissement dans un projet de long terme, car se créent alors les conditions d’un environnement scientifique plus favorable pour les projets de l’entreprise. En aucun cas, il ne s’agit de financement avec contreparties immédiates. Au total, c’est un facteur 10 qui peut être ciblé ici.

Si l’on résume, on arrive donc à un financement constant des pouvoirs publics, à une hausse modeste de la contribution des étudiants qui passerait de 1 % à 4 % (un peu plus si est acceptée l’idée que les étudiants étrangers peuvent financer plus, ce qui demandera certes un contrôle qualité plus important de nos formations, et donc un risque d’en augmenter le coût, mais ce ne sera que bénéfique pour notre système de formation), un financement de donation des particuliers qui passerait de 0 à 10 % à terme, un financement des entreprises qui passerait d’entre 2 et 10 % à 25 %, et un mécénat qui viendrait compléter ce chiffre. C’est déjà obtenir plus de 30 % des 50 % recherchés, et permettre à terme un financement de l’Enseignement Supérieur conforme aux ambitions du pays. Faire reposer cette ambition sur les seuls frais de scolarité conduirait à leur multiplication par plus de 30, ce qui ne serait pas acceptable socialement et n’aurait pas le mérite de consolider le rapprochement entre l’enseignement supérieur et le monde économique qui est en train de se produire.

Communiqué

Photo DR

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