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Salles de shoot : quand va-t-on tout nous dire ?

Tenter d’apporter une réponse à la question complexe qu’est la toxicomanie nécessite une approche globale et mesurée. Pas un nouveau coup de communication sans réflexion. La toxicomanie n’est pas un sujet à prendre à la légère. Il s’agit d’une maladie, qui requiert une prise en charge du toxicomane dans son ensemble

D’un point de vue médical tout d’abord, afin de permettre à ces personnes de sortir d’une situation de dépendance physique. D’un point de vue social ensuite, les toxicomanes s’enfonçant bien souvent dans les abimes de l’exclusion. En décidant l’implantation d’une salle de shoot dans le 10e arrondissement, on aurait pu s’attendre à la présentation d’un projet global, solide, chiffré. Pas à une série d’approximations.

Un tel projet, s’il nécessite d’être établi en concertation avec les professionnels, doit l’être en outre en concertation avec les habitants du secteur, qui verront débarquer dans leur quotidien cette salle d’un genre nouveau. Rien de tout cela pourtant n’a été fait.

En termes de fonctionnement, si les premiers financements ont été votés, de nombreux points obscurs demeurent sur le projet. Comment en effet la salle de shoot sera encadrée ? Combien de personnels médicaux, sociaux, seront présents? Les réponses sont attendues.

Un financement important

La question du financement est elle-même entourée de nombreuses zones d’ombre. Si 38 000 euros ont été votés au titre d’une subvention à l’association Gaia, cette subvention ne couvre que la phase exploratoire. Or, une phase de mise en œuvre puis de suivi devraient en découler, nécessitant donc un engagement financier pérenne et bien plus important pour la structure. En regardant ce qui se passe à l’étranger, on peut voir que le financement des structures similaires oscillerait entre 300 000 et 1 millions d’euros annuels. Pourtant, là aussi la municipalité est bien discrète, alors même qu’il s’agit de la gestion de deniers publics, donc de l’argent des parisiens.

Les précédents à l’étranger justement, parlons-en. S’il est généralement souligné que ces salles participent à l’amélioration de l’état de santé des consommateurs, en ayant notamment un impact sur les taux d’infection à l’hépatite C ou au VIH, ou le nombre de décès par overdose, tout n’est pas dit. Il faut pourtant mettre les pieds dans le plat, à la manière de Joséphine BAXTER, Vice-Présidente de la fédération mondiale contre les drogues, qui rappelle régulièrement que ces salles entretiennent la dépendance aux drogues au lieu de favoriser leur sevrage. C’est ce que l’on constate en Allemagne, où dans les 20 salles de shoot ouvertes, le nombre de morts du fait de drogue a baissé de 20% en 2011, mais où parallèlement le nombre de consommateurs a augmenté de 15%. Le Maire de Paris, le Maire du 10e arrondissement, se sont-ils seulement rendus à l’étranger pour voir sur place comment les choses étaient appréhendées ? Il faut parfois sortir de sa forteresse pour se rendre compte des faits. Ils auraient ainsi pu se rendre au quai 9 à Genève, qui a par exemple reçu la visite de Philippe GOUJON, Député-maire du 15e et spécialiste de ces questions à l’UMP.

Un lieu polémique

Le choix du lien d’implantation ensuite interroge. Implanter cette salle de shoot dans le quartier de la gare du nord, quartier déjà hautement stressé d’un point de vue sécuritaire, pose question. On nous rétorquera que c’est justement parce que ce lieu connaît déjà la présence de nombreux toxicomanes qu’il a été choisi. Mais quid de l’appel d’air que cette implantation créera à l’échelle parisienne ? N’est-ce pas favoriser un peu plus encore la ghettoïsation d’un quartier qui est déjà trop souvent pointé du doigt ?

L’implantation de cette salle pose également la question du respect de l’ordre public et de l’application de la loi. Les forces de l’ordre recevront instruction de ne pas verbaliser dans un périmètre déterminé autour de la salle de shoot. La consommation de drogue sur la voie publique est en effet-faut-il le rappeler-prohibée par notre législation ! A moins que l’implantation de cette salle ne soit que la 1e étape d’une dépénalisation des drogues par les responsables socialistes…

S’il est indispensable d’apporter aux toxicomanes un accompagnement de qualité, afin de les sortir de cette dépendance qui demeure l’un des fléaux de notre siècle, celui-ci ne peut survenir par l’édification d’une salle dédiée, sans aucune autre mesure. On ne peut les encourager à entretenir cette dépendance, et ce n’est pas leur tendre la main que de leur offrir une solution mal ficelée. Il s’agit ici d’une véritable préoccupation sociétale, qui demande un dialogue de l’ensemble de la classe politique. Pas une approche unilatérale de dirigeants qui ont choisi d’en faire un « coup de com » sans réflexion. Installer un open space de la toxicomanie, dans un quartier déjà délaissé par la municipalité, qui plus est sans aucune consultation des habitants, c’est faire bien peu de cas d’un sujet qui doit être pris avec le plus grand sérieux.

Déborah Pawlik – Déléguée adjointe UMP de la 5e circonscription de Paris

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